Dimanche 14 juillet

Bonjour,

Et voilà, le temps passe inexorablement, et notre camp touche à sa fin.
Les enfants sont descendus à Luz ce matin pour y faire leurs emplettes, et il semblerait que vous n’ayez pas été oubliés, surtout si vous aimez le saucisson. Mais je m’égare, et ces petits m’en voudraient de divulgâcher leurs surprises.
Cet après-midi, direction Lau-Balagnas, avec sa piscine et ses toboggans aquatiques. Autant dire que la mélancolie n’est pas invitée à la fête.

Avec la dernière soirée où l’agenda est épais, entre le repas (apéro, burger-frites, glace), les jeux, la chorégraphie répétée toute la semaine et enfin la boum, je n’aurai guère le temps de me lancer dans le lyrisme.

Je voudrais pourtant vous dire le plaisir que nous avons eu à partager ce camp avec des enfants adorables, dotés d’un bel appétit (nous n’avons absolument rien jeté, à aucun repas), et toujours enthousiastes quelle que soit l’activité proposée. S’il faut leur chercher un petit défaut, c’est leur propension à monter le niveau sonore durant les repas, obligeant l’équipe d’animation à de fréquents rappels à la Loi. Mais bon, c’est bien pour pinailler…
Cette équipe d’animation, justement, parlons-en en un seul mot : topissime !
Bien entendu, les deux co-Directrices, Marianne et Lucile, ont de l’expérience et sont rompues à l’encadrement d’enfants. Tout roule comme sur des rails, le programme, fignolé bien avant le départ, est tenu et les imprévus semblent anticipés tant ils ne perturbent en rien la vie à la Grange. Justine commence elle aussi à être bien rôdée : après deux camps l’an dernier, son BAFA en poche, elle enchaîne encore deux camps cette année. Clément, lui, l’a obtenu il y a quelques semaines et fait sa première « colo » comme animateur titulaire. Aucun souci d’intégration de gestion du groupe de garçon dans la tente. Enfin, Amélia et Emma, en formation, n’ont pas mis longtemps à prendre leurs marques.
Non, je n’oublie ma chère et tendre Sylviane, toujours présente, toujours attentive, intraitable sur le nettoyage et sur la fraîcheur des produits. Pour nous, c’était un camp de plus, mais où nous avions, comme l’an dernier, le bonheur d’avoir notre fille et notre petit-fils près de nous…
Avec tout ce beau monde, direz-vous, nous battons le record du monde de l’encadrement : 8 adultes pour 22 enfants. C’est vrai, mais encore faut-il que la mayonnaise prenne et qu’en plus elle ait de la saveur, où chaque ingrédient apporte sa touche pour ravir les papilles…
A midi, au repas, le camp de l’an prochain était déjà évoqué, ce qui est bien le signe d’un bien-être ressenti par tout le monde…

A demain à la gare de Saint Médard, pour retrouver vos filles et vos fils comme vous les aviez laissés, mais un peu changés aussi, grandis et devenus plus autonomes, pleins de beaux souvenirs de nos belles Montagnes Pyrénées…

Samedi 13 juillet

Bonsoir !
Ce matin, il y avait le Grand Jeu, prélude d’une journée placée sous le signe du Tour de France. En conséquence, les épreuves faisaient la part belle à la Petite Reine et à la Grande Boucle. Mais en hommage à Louis Bozon, infatigable arpenteur des régions de l’Hexagone, commençons par la présentation de la Vallée :
– « Chers amis, Bonjour !
C’est un plaisir de vous retrouver aujourd’hui pour une nouvelle édition du jeu des Mille Héros. Aujourd’hui, nous sommes dans le charmant village de Sazos, niché au cœur des Hautes-Pyrénées. Ici, c’est avant tout une histoire de montagnes majestueuses et de vallées verdoyantes, une invitation à la découverte et à l’émerveillement. 
Sazos offre une vue plongeante sur Luz-Saint-Sauveur, un autre joyau des Pyrénées. Victor Hugo, fasciné par la beauté du site, l’a immortalisé ainsi : « Ce village, ils l’ont appelé Luz, lumière ». Les maisons entourent l’église des Templiers, témoignage de la présence des célèbres chevaliers dans la région. Cette église fortifiée, avec son architecture unique, est un véritable trésor du patrimoine médiéval. Avec le Château Sainte-Marie, perché sur les hauteurs et qui offre une vue panoramique exceptionnelle, le visiteur plonge dans l’histoire tumultueuse de la région.
Nous sommes en plein cœur du Pays Toy, le pays de l’agneau à l’appellation contrôlée « Barèges-Gavarnie ». Les habitants, qui portent haut le nom de « Toys », y sont fiers de leur patrimoine et de leur culture.
C’est avec grand bonheur que nous allons voir les enfants concourir dans les épreuves concoctées par l’équipe d’animation. ».
Je ne vous décrirai pas la frénésie qui s’est emparée de la troupe joyeuse et virevoltante, ni de l’application mise par chacune et chacun pour triompher des chausse-trappes. Encore moins des cris de victoire à l’issue de ces Jeux où nos héros semblaient effectivement mille tant leurs cris résonnaient dans toute la vallée…

Puis vint le moment d’aller voir passer le Tour de France. En voici le récit, comme l’aurait peut-être écrit (en beaucoup mieux) Antoine Blondin dans l’Equipe :
« En cette journée où le soleil s’acoquina avec les cimes pyrénéennes, le Tour de France nous offrit un ballet majestueux de souffrance et de gloire. Le départ se fit de Pau, cette cité royale où l’ombre d’Henri IV veillait encore sur les rues pavées. Très vite, la tranquillité laissa place à l’ardeur des coups de pédale, chaque montée devenant une strophe d’un poème épique.
Les coureurs affrontèrent le triptyque redoutable : le Tourmalet, l’Hourquette d’Ancizan, et enfin le Pla d’Adet. Ces trois cols, dont deux classés hors catégorie, se dressèrent comme autant de remparts à franchir.
Nous étions postés, avec les enfants, derrière le petit muret qui longe la route de Luz, au droit de la passerelle qui traverse le gave pour rejoindre Saligos.
Longue fut l’attente, heureusement trompée par un pique-nique salvateur, lorsque nous vîmes la caravane publicitaire défiler dans un tourbillon de couleurs et de musique. Les enfants, les yeux écarquillés et les bras chargés de casquettes, bobs, mini saucissons et bonbons tombés comme une manne céleste de l’incroyable cohorte des véhicules transformèrent ce moment en fête avant le grand combat. 
Puis, les échappés arrivèrent, parmi eux, Biniam Girmay en maillot vert et le champion du monde Mathieu Van der Poel.
Trois minutes plus tard, le peloton apparut, où Pogacar, se détachant du serpent bigarré des coureurs dans son habit de lumière, élaborait sa stratégie avec ses coéquipiers, tel le général Alexandre se lançant aux confins du monde connu.
Nous laissant derrière eux, les forçats de la route fondirent vers le Tourmalet : Premier défi, ce col mythique vit les premières escarmouches, décimant les rangs des téméraires.
Puis vint la Hourquette d’Ancizan : Moins célèbre mais tout aussi impitoyable, cette montée fut le théâtre des stratégies les plus fines. L’infatigable Nils Politt, à la planche durant plus d’une heure pour limiter l’écart à quatre minutes au maximum, joua sa partition avec brio.
Ultime épreuve, la montée vers Pla d’Adet fut le champ de bataille final. Revenus à la Grange, nous vîmes Adam Yates jouer sa partition à la perfection, portant une attaque à sept kilomètres de la ligne, dans le but de servir de point d’appui à Tadej Pogacar.
Trois bornes plus loin, le Maillot Jaune se dressa sur les pédales, et, martyrisant sa machine, se livra à un récital homérique, laissant ses adversaires sans réponse. 
Tel un Ulysse moderne, il dompta la pente, remportant sa treizième victoire sur le Tour de France. Jonas Vingegaard et Remco Evenepoel, qui ce matin encore prétendaient le jeter à bas de son trône se retrouvèrent relégués à des rôles de figurants sublimes.
En ce jour, le Tour de France nous offrit un spectacle digne des plus belles épopées. Les montagnes pyrénéennes, témoins muettes de cette lutte titanesque, résonneront encore longtemps des cris des enfants et des exploits de ces hommes qui, le temps d’une journée, touchèrent du doigt l’éternité. »

Pour terminer la journée, les enfants sont en train de mener l’enquête, dans un jeu de Cluedo : qui a saboté le vélo de Raymond Poulidor, le grand-père de Mathieu Van der Poel ? Affaire à suivre…

Vendredi 12 juillet

Avant toute chose, toute l’équipe d’animation se joint à moi pour vous rassurer : s’il y a eu de gros orages sur Lourdes, où des grêlons gros comme des balles de ping-pong ont causé de gros dégâts, ici, nous n’avons pas été touchés. Il est tombé à peine quelques gouttes dans la nuit, mais tellement peu que le sol était sec ce matin.
En conséquence, aucun souci pour les dormeuses et dormeurs sous tente, qui n’ont même pas entendu le tonnerre dans le lointain…

Nous voici donc partis pour le cinquième jour du camp…

Ah les amis, je vous prie de croire que vos enfants ont bon appétit ! Ma grand-mère avait une expression imagée : « Celui-ci, il vaut mieux l’avoir en photo qu’à table ! ». Eh bien c’est le cas de vos enfants. Depuis le temps que je cuisine à Bayen, vous pensez si j’en ai vu, des morfales ! Mais là, ça force le respect. La nuée de sauterelles qui s’abat sur l’Egypte dans la punition divine dont cause la Bible, c’est de la gnognotte en branche à côté de ces clients.
Vous voulez un exemple ? Prenons le repas d’hier soir : melon, plat farci et gâteau 5-4-3-2-1 aux poires. On s’était dit avec Sylviane que d’habitude, ils nous liquident tous les plats, mais que là, les aubergines, les courgettes et les tomates cuites, ils allaient tordre le nez dessus. Il suffisait d’en faire une belle quantité, et il nous en resterait pour les repas que nous faisons seuls à la Grange quand ils partent en vadrouille. Pour 30, on avait compté 3kg de patates, 3kg d’aubergines, 3kg de courgettes et 2kg de tomates. Plus la farce : 1kg de steak haché, 1,5kg de chair à saucisse et 0,5kg d’oignons. Trois grands plats à four !
Eh bien dites-vous qu’il a fallu se battre pied à pied pour arriver à soustraire la part témoin que l’on se doit de conserver au cas où ! Liquidés, les trois plats : un coup pour rigoler, et un coup de rabe pour l’estocade. Ah, les gueux ! Je ne cause même pas du gâteau (deux grandes plaques à four), qui n’a pas souffert et ne s’est pas senti partir…
Et c’est comme ça tous les jours, il y a intérêt à usiner dur pour fournir…
Du coup, j’ai voulu revendiquer. Mais vous connaissez la Trésorière : dès qu’on parle dialogue social ou augmentation, elle sort son flingue. Et pas le Chassepot du pékin moyen : du matos de concours, le chouette appareil à composter les couennes pachydermiques ! Je suis rentré dans le rang vite fait, croyez-moi !
Il y a malgré tout un avantage : les commerçants de Luz sont charmants avec moi. A la Boulangerie des Gaves ou chez Sajous, j’ai droit à des grands sourires et des « Ah, voilà Bayen ! » dès que je passe la porte. Pour vous dire : chez Carrefour, ils ont même embauché une jeune fille dont le seul boulot est de répandre un tapis de pétales de roses devant mon chariot lorsque je fais les courses. Je n’exagère pas ! Il paraît même que Ferrari et Aston Martin cherchent à ouvrir une succursale dans la vallée tellement il y a de la demande chez ces nouveaux riches…

Mais je m’égare : ce matin, l’équipe d’animation proposait aux enfants de fabriquer des maisons de fées. Je ne vais pas pouvoir vous raconter, le mieux est que vous regardiez les photos pour vous faire une idée des belles demeures nées de l’imagination des différentes équipes. Pas de jury, pas de classement : juste le plaisir de créer et celui de contempler…

Cet après-midi, après les derniers fignolages sur les maisons de fées, direction la Ferme des Cascades, en haut de Sazos, histoire de rencontrer les chèvres, leur vie, leur œuvre… Tenez, prenons, au hasard, la Blanchette :
Ah ! qu’elle était jolie la petite chèvre de Sazos ! Qu’elle était jolie avec ses yeux doux, sa barbiche de sous-officier, ses sabots noirs et luisants, ses cornes zébrées et ses longs poils blancs qui lui faisaient une houppelande ! Et puis, docile, caressante, se laissant traire sans bouger, sans mettre son pied dans l’écuelle. Un amour de petite chèvre !
– «  Stop Coco !!! Tu ne te foules pas, tu nous refiles du Daudet, directement copié-collé d’Internet ! Escroc ! Plagiaire ! ».
– « Bon, d’accord. On essaie autre chose… Madame Blanchette, racontez-nous votre vie à la Ferme des Cascades… ».
– « Bêêê… Vous savez, ici, on mène une vie saine, simple et rustique. Nous sommes en liberté aux alentours, dans les prés. Et matin et soir, c’est la traite, qui se fait au son d’une musique douce, avec les poules qui vaquent autour de nous, picorant de-ci, de-là… C’est bon pour notre psychisme, et, en conséquence, pour la qualité du lait. Là, par exemple, vous voyez, toutes les chèvres claires vont se rendre à l’étable. C’est la traite des blanches… Et puis ce seront les foncées qui viendront ensuite. Et nous nous retrouverons toutes ensemble pour aller déguster les fleurs de la prairie… ».
– « Une vie simple et au grand air, dans une ambiance de franche camaraderie, des menus gourmands et équilibrés, cela ressemble à un camp de Bayen. C’est formidable, mais les soirées d’hiver, lorsque la neige vous confine, n’est-ce pas un peu long ? ».
– « Bêêê oui. Il faut prendre son mal en patience. Certaines, pour le sabbat, voudraient bien aller au Belzébuth, la boîte à la mode… Mais c’est interdit, alors on oublie, on n’en fait pas tout un fromage… D’autres jouent du violon avec le chat Gall. Ce qui reste le plus efficace pour passer le temps et attendre les beaux jours, c’est encore de bouquiner… ».

Jeudi 11 juillet

De notre envoyé spécial, Kévin Frison-Roche (l’arrière-petit-cousin de la logeuse du célèbre alpiniste) :

Ce matin-là, le soleil perçait à travers les nuages qui enveloppaient le cirque de Gavarnie, offrant le spectacle majestueux de cette nature grandiose et sauvage. Les enfants, pleins d’énergie et d’excitation, se préparaient pour une journée inoubliable. Pour certains d’entre eux, c’était leur première véritable randonnée en montagne.
À leur tête, un guide expérimenté, Stéphane, un montagnard aguerri aux yeux pétillants de bienveillance, veillait à ce que chacun soit prêt pour l’aventure. Les animateurs avaient expliqué l’importance de bien s’équiper : chaussures de randonnée solides, casquette et lunettes de soleil, vêtements adaptés et gourdes remplies d’eau fraîche.
Les enfants, les yeux écarquillés, écoutaient les dernières recommandations de Stéphane avant de s’élancer sur les sentiers escarpés. « N’oubliez pas, la montagne est belle mais elle peut être imprévisible. Restez toujours en groupe et suivez mes instructions. »
La troupe s’enfonça dans la vallée, le murmure des ruisseaux et le chant des oiseaux accompagnant leurs pas. Le chemin, bien que parfois raide, offrait des panoramas à couper le souffle. À chaque virage, une nouvelle vue sur les imposantes parois calcaires du cirque se révélait, laissant les enfants émerveillés.
Stéphane s’arrêtait régulièrement pour partager ses connaissances sur la faune et la flore locales. Il racontait l’isard gracile et le bouquetin majestueux bondissant sur les rochers ou une fleur rare cachée dans un recoin ombragé. Les enfants buvaient ses paroles, fascinés par ce monde qu’ils découvraient. Stéphane leur raconta également l’histoire de la brèche de Roland, ce célèbre passage creusé selon la légende par l’épée du chevalier Roland. Bien qu’ils ne puissent la voir depuis leur position sur le plateau de Bellevue, l’histoire captiva leur imagination.
Soudain, l’un des enfants s’exclama : « Regardez, des marmottes ! » Tous les regards se tournèrent vers une petite clairière en contrebas où plusieurs marmottes s’affairaient. Quelques-unes jouaient entre elles, tandis que d’autres semblaient surveiller les environs. Plus émouvant encore, de jeunes marmottes sortaient timidement de leurs terriers, sous l’œil vigilant de leurs parents. Les enfants, captivés, l’œil rivé à la lunette d’approche de Stéphane, observaient en silence, tentant de ne pas effrayer ces adorables créatures.
Après plusieurs heures de marche, le groupe s’arrêta pour manger, avec la grande cascade de Gavarnie, l’une des plus hautes d’Europe, en toile de fond. L’Homme Couché, dessiné par les montagnes, dormait paisiblement au fond du cirque. Les enfants déballèrent leur pique-nique, savourant chaque bouchée tout en contemplant la grandeur de la nature qui les entourait.
Tout à coup, Stéphane leur signala un gros monticule incongru d’aiguilles de pin. C’était une fourmilière, dans laquelle des millions d’insectes vaquaient à leurs occupations. En posant sa main sur l’édicule, il provoqua la réaction de défense des habitantes. L’odeur de l’acide formique, âcre et prégnante, envahit les narines des explorateurs, les forçant à reculer.
Dans l’après-midi, alors qu’ils se reposaient au bord d’un torrent, Stéphane leur proposa de se tremper les pieds dans l’eau fraîche. Les enfants, ravis, enlevèrent leurs chaussures et plongèrent leurs pieds dans l’eau glaciale, riant aux éclats en sentant le courant les chatouiller.
Tandis qu’ils reprenaient leur chemin, Stéphane leva les yeux et montra un groupe de vautours fauves tournoyant haut dans le ciel. « Regardez ces majestueux rapaces. Ce sont des vautours fauves. Ils profitent des courants ascendants pour planer sans effort. » Les enfants, fascinés, suivaient des yeux les grands oiseaux qui dessinaient des cercles dans le ciel azur, ajoutant une note sauvage et libre à leur journée.
Sur le retour, ils eurent la chance d’apercevoir des lys Martagon, ces fleurs délicates et élégantes aux pétales rose vif, un spectacle rare et précieux en ces altitudes.
Ainsi se termina cette journée de randonnée au cirque de Gavarnie.
Pour ces enfants, elle resterait gravée dans leurs mémoires comme une belle aventure, une rencontre avec la montagne qui éveillerait en eux un amour et un respect durables pour la nature.

Mercredi 10 juillet

Ce matin, direction la Colline aux Marmottes, devenue depuis quelques années le Parc Animalier des Pyrénées. Sous le ciel azur et les cimes des montagnes, il se dresse tel un écrin de verdure et de vie. Les sentiers sinueux, tapissés de verdure, guident nos visiteurs émerveillés au cœur d’un royaume où la nature règne. Mais cet après-midi, il y a accrobranche, alors on ne s’arrête que devant les animaux des Pyrénées, délaissant pour cette fois les perroquets et les loutres d’Amérique du Sud…

Là, dans l’ombre des arbres, apparaît l’Ours Brun majestueux. Son regard, empreint de sagesse et de force, scrute l’horizon. Ou bien cherche-t-il simplement son pot de miel ? Sa démarche lourde et puissante témoigne de la grandeur de son espèce, autrefois souveraine des vastes forêts pyrénéennes. Mais attention à ne pas déranger sa sieste, sous peine de réveiller une vraie boule de poils mal léchée !

Un peu plus loin, dissimulés par la brume matinale, les Loups rôdent en silence. Leur allure noble et leur regard perçant incarnent la nature sauvage et indomptée. Ils sont les gardiens de la nuit, veillant sur les secrets des bois obscurs. On dit même qu’ils organisent des réunions secrètes, mais chut, c’est un secret bien gardé (surtout pour les moutons).

Silencieux et furtif, le Lynx s’avance. Ses oreilles ornées de pinceaux délicats se dressent, captant les moindres murmures du vent. Dans ses mouvements gracieux et précis, il incarne l’esprit mystérieux des montagnes, énigmatique et insaisissable. On pourrait presque le comparer à un ninja, mais avec plus de poils et moins de carapace.

Sur les pentes escarpées, l’Isard bondit avec une agilité sans pareille. Son allure légère et ses sauts audacieux défient la gravité. Tel un danseur céleste, il maîtrise les hauteurs avec une aisance divine, inspirant respect et admiration. Et il paraît que seuls les chanteurs savent où il dort…

Dans les cieux immenses, le Vautour Fauve plane majestueusement. Ses ailes déployées embrassent l’horizon, dominant les vallées et les crêtes. Il est le gardien des airs, veillant de son regard perçant sur les âmes de la montagne. Eh oui, il sait repérer le moindre sandwich abandonné par un touriste distrait…

À l’apogée des cimes, l’Aigle Royal s’élance. Sa silhouette puissante et sa vue perçante sont les atouts de sa majesté. Roi des hauteurs, il chasse avec une précision mortelle, incarnant la force et la souveraineté des Pyrénées. N’oubliez pas de lever les yeux au ciel, sinon vous pourriez bien devenir sa prochaine cible… Une fiente de pigeon sur l’épaule, c’est gênant, alors là, imaginez…

Le Bouquetin se dresse fièrement sur les rochers escarpés. Ses cornes majestueuses et sa posture assurée symbolisent la maîtrise et la résistance. Il est le maître des falaises, défiant les abîmes avec une assurance inébranlable. Et ne soyez pas surpris s’il vous jette un coup d’œil condescendant depuis son perchoir pendant que vous tirez la langue en montant les escaliers…

Enfin, sur les douces prairies, la Marmotte charme de sa présence joviale. Ses cris aigus résonnent comme un chant joyeux, et sa compagnie anime les espaces ouverts, pleins de vie et de mouvement.

Et si jamais vous entendez des rumeurs sur celle qui emballe le chocolat dans le papier d’alu, n’y croyez pas trop vite, elle a une très bonne équipe marketing…

Après le repas, livré sur site, s’il vous plaît, on ne se refuse rien à Bayen, cinq minutes de bus pour rejoindre Chlorofil et ses parcours divers, à travers les fûtaies, voire à la canopée pour les plus audacieux.

En voici le récit, sur le mode épique :

Une clairière au cœur d’une forêt dense, des cordes et des ponts suspendus s’élèvent vers les cimes. Un groupe d’enfants, harnachés dans leur baudrier, se prépare pour une aventure au sommet des arbres. Lucile, maîtresse de l’accrobranche, tel Cyrano, s’avance pour les encourager…

Lucile-Cyrano :

Ah ! Mes jeunes amis, en ce jour éclatant,

Vous vous apprêtez à gravir l’empyrée verdoyant,

Où cordes et ponts défient les lois du sol,

Et où l’audace s’élève, en vertige et en vol !

Elle se tourne vers un jeune enfant tremblant à l’idée de commencer.

Toi, novice timide, qui déjà, dans ton cœur,

Sentais monter l’effroi et siffler la peur,

Ne crains point ! Vois cette corde, ce lien fidèle,

Qui, de tes premiers pas, sera la sentinelle.

Elle lève les bras vers le sommet des arbres où d’autres enfants, plus expérimentés, se déplacent avec aisance.

Regarde là-haut, ces acrobates téméraires,

Qui se jouent des hauteurs et des défis aériens.

Eux aussi furent novices, eux aussi commencèrent,

Mais la confiance en eux tissa leur destin.

À l’accrobranche, on trouve de tout, enfants,

Des vaillants, des prudents, et des un peu moins grands.

Je vais, pour vous, de ces héros du bois,

Dessiner le portrait en vers, d’une voix.

A l’apprenti précautionneux :

« Parbleu ! Pas de précipitation,

Chaque pas est pesé, chaque mouvement calculé. »

Au timide audacieux :

« Avance-toi prudemment, mais avec ambition,

Chaque branche est un défi, chaque corde, une mission. »

Au téméraire habile :

« Hop là ! Une branche, une corde, c’est trop facile,

Tu défies la hauteur, le danger, le vacillement gracile. »

Enfin, au maître des cimes :

« Depuis ces cimes, tu contemples le monde,

Avec un pied léger, tu franchis chaque ronde. »

Alors, enfants, que l’aventure commence,

Que chaque cœur batte en rythme, que la peur soit nuance,

Car au sommet des arbres, au-delà de l’effroi,

C’est le courage, l’entraide, qui mène le pas de soi.

Allons, mes jeunes héros, au cœur de la forêt,

Que cette épopée d’accrobranche soit pour vous un reflet,

D’audace, de rires, de défis relevés,

Et que chaque sommet franchi soit une victoire célébrée !

Lucile-Cyrano s’incline, un sourire bienveillant aux lèvres, tandis que les enfants, inspirés et courageux, commencent leur ascension vers les cimes…

Mardi 9 juillet

Mesdames et Messieurs, bien le bonsoir à vous !
Aujourd’hui, la matinée et l’après-midi ont été fort différentes : après une nuit sans problème (pas d’attaque de chouette répertoriée) et un petit déjeuner roboratif, histoire de partir du bon pied, la troupe s’attaquait à trois ateliers différents. L’un permettait de se fabriquer un bâton de marche sculpté dans la masse au couteau de trappeur, le deuxième de s’initier à la tèque (ancêtre du cricket et du base-ball) et à un mikado géant, et le troisième de réaliser une oeuvre d’art à base d’argile entièrement façonnée à la main. Ne tergiversons pas et soyons honnêtes : si la tèque et le mikado furent une réussite et que les bâtons ont fière allure, les oeuvres d’argile ont souffert du dérèglement climatique. Le soleil, qui était censé les sécher de ses doux rayons, les a totalement craquelées et déstructurées, les transformant en une allégorie surréaliste que même un Dali sous acide n’aurait osé imaginer. Bref, il y a peu de chance que votre salon s’enorgueillisse de les présenter à la vue d’un public émerveillé et enthousiaste… Lucile va tenter de rattraper le coup, mais n’espérez pas trop… Vint ensuite l’atelier « cartes postales », où nos chers petits ont fait preuve d’un lyrisme effréné, avec des envolées telles que « Je m’amuse bien, bisous » ou « Il fait beau et on rigole bien »…
Après le repas où chacun a fait grandement honneur aux plats proposés, tout le monde est parti pour étrenner son bâton de marche. Tout d’abord en visitant les moulins à eau de Sazos, puis en randonnant jusqu’à Viscos, mais en montant tout d’abord vers Grust, avec ma foi un petit dénivelé qui agace les mollets avant de revenir sous le couvert de la forêt où coule un ruisseau rafraîchissant… Un balade de plus de huit kilomètres, ça creuse, alors, après une douche réparatrice, le repas redonnait des couleurs.
Heureusement, car c’est maintenant la veillée théâtre, où il faut avoir tous ses neurones en éveil pour improviser sur un thème imposé devant toute l’assemblée…
Tout à l’heure, le marchand de sable devrait avoir des clients…

Lundi 8 juillet

Bonsoir ! Tout le monde est bien arrivé, chacun a mangé son pique-nique, s’est installé dans sa tente. Et la volée de moineaux est partie jouer au parc du Calvaire à Sazos. Vous aurez en conséquence des nouvelles fraîches tout à l’heure…

Chère Maman, cher Papa,
Il faut que je vous raconte notre première journée à Bayen. Bon, on a pris le train ce matin, mais ça, vous le saviez déjà, puisque vous étiez à la gare… C’était un petit train pas terrible, mais après, on a pris le TGV. Ça n’a pas duré trop longtemps, parce qu’on a mangé des tas de bonbons et qu’on rigolé avec les copines et les copains. A la gare de Lourdes, la Capoumobile (c’est comme ça qu’ils appellent le bus, ici) nous a amené jusqu’à la Grange. C’était pile l’heure du pique-nique, alors on a mangé. Et puis ils nous ont fait visiter, mais il y en avait plein qui connaissaient déjà. On s’est installé dans les tentes, et on a tous choisi notre lit. Après, on nous a expliqué les règles de vie , parce qu’il y a plein de trucs qu’on a pas le doit de faire : courir en tongues, descendre dans le torrent, crier comme des fous et plein d’autres choses qui sont pourtant marrantes. Mais il paraît que vous serez contents de nous quand on vous dira qu’on est pas des sauvageons…
Après, on est montés jusqu’à Sazos. C’est trop super, il y a une fontaine avec une tête de bélier, un lavoir, un calvaire où il y a un parc de jeux géniaux. Là, on a fait des super parties de Gamelle (c’est un jeu que je vous expliquerai, mais pas trop pour pas que vous puissiez me gagner). On a goûté, et puis on a fait deux groupes : un qui a continué la balade et l’autre qui est allé au City Stade pour jouer au Ballon Prisonnier et à la Balle Américaine. Ceux qui ont fait la balade ont voulu faire croire qu’ils avaient vu une biche, mais ce n’était pas vrai, c’est que des mythos…
On est rentrés prendre la douche, et ceux qui étaient de service ont mis la table. Après, on a mangé, et Sylviane et Olivier étaient drôlement contents, parce qu’on a récuré tous les plats, même la salade… On a rigolé, sans faire trop de bruit, un peu quand même, parce qu’on avait plein de trucs à se dire.
Et puis, il y a encore eu des services : débarrassage, aspirage, portage de vaisselle, vidage de poubelles…
Là, on part pour la veillée surprise de Marianne : il va falloir être gavés attentifs et se souvenir de tous les prénoms, et il y en a plein à apprendre…
Après, ce sera la nuit, et on ira se coucher sous nos tentes. Il paraît que si on ne fait pas trop de bruit, on entendra les chouettes qui se parlent en chassant.
Je vous dirai demain si je les ai entendues hululer…
Bonne nuit !